Le général major Joseph Kabila, 35 ans, est le premier président
démocratiquement élu en République démocratique du
Congo (RDC, ex-Zaïre) depuis l'indépendance de cette colonie belge,
en 1960.
Les résultats du second tour de l'élection présidentielle,
qui a eu lieu le 29 octobre, ont été annoncés, mercredi
15 novembre dans la soirée, au Grand hà´tel de Kinshasa placé
sous haute surveillance des casques bleus de l'ONU. En aoà»t, la publication
des chiffres du premier tour avait donné lieu à trois journées
de violences meurtriàres.
Joseph Kabila, fils et successeur en 2001 de Laurent-Désiré Kabila,
l'homme qui avait renversé la dictature de Mobutu en 1997, a obtenu 58,05
% des suffrages exprimés, contre 41,95 % à son adversaire, Jean-Pierre
Bemba, 44 ans, héritier du mobutisme, selon les chiffres annoncés
par l'abbé Apollinaire Malumalu, le président de la Commission
électorale indépendante (CEI). Les candidats disposent de trois
jours pour transmettre des recours à une cour supràme de justice.
Si cette instance confirme le résultat, Joseph Kabila sera officiellement
investi le 10 décembre. Son élection marque le terme des quatre
années de "transition", qui ont suivi une longue période
de guerre (1996-2002) ayant causé la mort de plus de trois millions de
personnes.
Dàs l'annonce des résultats, M. Kabila est intervenu à
la télévision, se présentant comme "le président
de tous" les Congolais, demandant à ses compatriotes de "rester
unis et de vivre dans la fraternité et la tolérance". La
veille, il avait déclaré qu'il n'hésiterait pas à
faire rétablir l'ordre en cas d'agitation. Mercredi soir, alors que des
manifestations de liesse accueillaient la victoire de M. Kabila dans les villes
de l'est du pays o๠il domine, la capitale Kinshasa, o๠M. Bemba
est largement majoritaire, est restée calme.
"HOLD-UP à‰LECTORAL"
Le candidat battu n'avait pas réagi jeudi matin au résultat annoncé,
mais son directeur de campagne, Fidàle Babala, a dénoncé
un "hold-up électoral". Contestant "un score factice qui
ne reflàte pas le vote transparent que voulaient les Congolais",
il a réfuté cependant l'hypothàse d'une riposte violente.
M. Babala estime que "le pays n'a pas besoin de plus de troubles"
et que "ce n'est pas la rue qui construit une démocratie".
"Nous réagirons en constituant une opposition constructive, mais
nous ne ferons pas le plaisir de blanchir un pouvoir qui commence par une tricherie."
De son cà´té, William Swing, le représentant spécial
des Nations unies en RDC, a, jeudi matin sur Radio France internationale, "félicité
les Congolais pour le calme et la sérénité avec lesquels
ils ont fait leur devoir et montré leur détermination à
choisir leurs dirigeants".
La violente mise en cause de l'honnàteté du processus électoral
par l'archevàque de Kinshasa, Mgr Frédéric Etsou, fait cependant
craindre une réaction violente dans la capitale congolaise, oà¹
des affrontements ont fait 4 morts, samedi 11 novembre.
Les observateurs de l'Union européenne font état d'"abus
clairs" des "listes dérogatoires" d'électeurs -
1,5 million sur 25 millions -, censées permettre le vote de personnes
omises ou autorisées à voter loin de leur domicile. Mais ils notent
que ce phénomàne "massif" est relevé aussi bien
dans les provinces acquises à M. Kabila, comme le Katanga, que dans celles
o๠domine M. Bemba, comme l'Equateur. Selon eux, ces anomalies ne devraient
"pas avoir d'incidence sérieuse sur le résultat de la présidentielle".
Philippe Bernard Le Monde 17/11/2006